ANCIENNETE ET NOM DE LA VILLE
 

Les registres matricules n'ont pas toujours existé, il est donc impossible de savoir précisément l'âge de notre ville. D'aucuns pensent qu'elle fut mise au monde par les gaulois, à cause d'une galerie qui se trouvait le long du château, du côté de la ville, et que cette architecture en galeries est de style gaulois; outre cela, par les Romains, parce que pendant les guerres en Morinie, ou pendant les 500 ans à peu près qu'is restèrent dans la Gaule soumise à leur domination, ils ont pu fonder la forteresse pour eux mêmes, ce qu'on serait porté à croire, à cause des chemins qui y aboutissent (à savoir, le chemin de Thérouanne, celui des 7 voies en Boulonnais, qui pouvaient arriver en face de la Sénéchaussée et celui d'Arras qui pouvait, lui, entrer par la porte du vieux château, à l'Est).

Quoi-qu'il en soit, nous sommes libres de croire que les Morins et les Atrébates, comme le reste des peuples de la Gaule, ayant besoin de se préparer un refuge en cas d'alerte, plaçaient des forts sur les hauteurs et dans le voisinage des rivières. Le château surgit donc au-dessus de la petite rivière de Lhena ou Terna, plus tard Thernois, Ternois et enfin Ternoise. Les maisons ne durent pas tarder à arriver, lui une fois arrivé là, propre et né pour protéger.

Inutile donc de requérir une plus antique naissance. Peut-être existions nous sous un autre nom, soit ! Quand César vint attaquer les Morins, qu'il eut bien de la peine à soumettre, nous étions donc des braves, alors, que nous ayons eu un beau château ou de pauvres cabanes. Les Romains envoyaient la cavalerie de leurs armées des Gaules se refaire dans ce pays; et des écrivains trouvèrent de là l'étymologie de Tervane ou Terrane, nom qu'il porta longtemps ainsi que la ville. Ce nom disent-ils, fut formé de celui que les Romains donnèrent à tout ce pays. Terra avenae, Terre d'Avoine. Il suffit d'une petite syncope pour en faire celui de Tervana. Nous verrons d'ailleurs un Comte de Tervane _St Pol_ ajouter à son nom de Hugues celui de Campdavaine ou champ d'avoine, et prendre pour armoiries une gerbe d'or en champ d'azur. Comme on disait le pays Tervanois, il n'est pas étonnant que bientôt, par la vitesse de la prononciation, on ait dit Ternois en parlant du pays et de la rivière, ce nom resta longtemps, on disait : le comté de ternois.

Des auteurs ont confondu, à cause de la ressemblance des noms, notre ville de Tervana, _St Pol_, avec Tervanna _Thérouanne_, capitale des Morins. C'est à cause de l'U qui remplaça longtemps le V : Tervana, qu'on écrivit d'abord Terüana et non Terüanna, _Thérouanne_ avec deux N. Marianus Scottus, qui écrivit vers le milieu du onzième siècle , dit que Clodion vainquit les Romains vers l'an 438, et s'empara des Tervaniens et des Morins. Il distingue bien ainsi les deux peuples.

Ce nom de Tervana fut changé en celui de St-Pol, et voici comment :
Les Danois étant venus faire une incursion chez nos circonvoisins, mirent tout à feu et à sang, nulle forteresse, nulle chaumière ne fut épargnée. Après l'orage, quand le flot dévastateur se fut retiré, refoulé par les Comtes de Boulogne et de Flandre, et surtout par le roi Rodolphe de Bourgogne, on vit au milieu de cette contrée ruinée, notre chère petite ville sourire paisible et toute rayonnante de tranquilité. Cela se passa en 881, au temps de Louis et Carloman, un an après l'incendie d'Arras par les Normands. Un nuage miraculeux sans doute l'avait enveloppée, charmante vierge, et l'ennemi l'avait croisée sans la voir. Nos bons ayeux ne se contentèrent pas de reconnaître par des neuvaines la protection du saint apôtre , sous le patronage duquel ils avaient déja placé leur ville ; ils voulurent la nommer du nom de leur Saint. Plus tard, l'ortographe se corrompit; et l'on à fait St-Pol. Les habitants ont encore le même Saint pour patron.

On peut arriver à cette manière d'écrire, en se rappelant que les Espagnols ayant tenu la ville quelques temps, l'appelèrent en leur langue, San-Paolo, d'où Saint-Pol, par le retranchement de l'A; l'O de la terminaison disparut dans la prononciation française.

La conservation d'une ville seule, restée debout au milieu du sac de toutes les autres et de la dévastation de toute la contrée qui l'entoure, a été remarquée par les chroniqueurs.
"Il y a, dit Lambert d'Ardres, un bourg et son château appelé Tervana, situé près de la rivière Téna ou Terna, commandant à tout le territoire qui s'étendait même au-delà de la Canche...Ce bourg avait le nom de Tervana, avant de 900 de J-C...Ce nom fut changé en celui de St-Paul, parce que, lors d'une incursion des Danois en 881, ce bourg et son château éprouvèrent la protection de Saint PAUL. Pauli Fanum (le temple de St-Paul) seul, n'est pas compté parmi les endroits qui furent réédifiés; c'est qu'il n'avait pas été détruit. Le nom de Tervaniens fut changé en celui de St-Polois."

Après tout, libre à nous de croire que les habitants, attaqués comme les autres, joignirent le courage aux prières, et que dévôtements persuadés que leurs prières seules les avaient sauvés, ils en témoignèrent, comme ils le pouvaient, leur reconnaissance au saint.

Tervane ou St-Pol et le pays de Tervane, pays Ternavien, et enfin pays de Ternois, furent érigés en Comté vers 543. Un Comte de Boulogne nommé Roulphe ou Rodolphe, fils d'Aimeric, lui même fils de Leger ou Leodgard (1er comte de Boulogne en 511) donna alors en dot cette contrée à sa fille. Ce Roulphe, outre sa fille mariée à Leodegond, avait un fils nommé Robert ou Robrès, qui s'empara de la Flandre, du pays des Normands, et donna, soit dit en passant, à sa fille, épouse d'un comte de Vermandois, ce qu'il appela le Comté d'Hesdin.

d'après "Monographie des villes et villages de France" Saint-Pol et ses environs par M. Sauvage

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